lundi 12 avril 2021

Tourisme rural entre mise en valeur conventionnelle et approches d'avenir : Une équation si harmonieuse?

 

Le tourisme rural se distingue du tourisme urbain en termes de type d’expérience, d’utilisation des ressources naturelles, d’inclusion des populations locales et de développement des infrastructures. Cependant, un touriste peut passer ses vacances dans les zones rurales et urbaines. Un autre point de vue est que le tourisme rural se produit dans des paysages sauvages éloignés. Outre la complexité des définitions du tourisme rural, ce dernier est perçu différemment selon les pays. Par exemple, les produits du tourisme rural sont souvent basés sur des maisons d'hôtes, des gîtes et/ou bivouacs avec des chambres meublées de façon traditionnelle, par exemple. En Finlande, les touristes ruraux louent généralement des chalets. Aux Pays-Bas, les produits de tourisme rural consistent à camper dans une ferme et à pratiquer des activités liées aux itinéraires telles que la marche, le vélo ou l'équitation. En Hongrie, le tourisme rural a un terme spécial, le tourisme de village, se référant au tourisme dans les villages, au Maroc, c’est l’ensemble des activités déployées par les touristes nationaux et étrangers dans les milieux ruraux, à savoir les randonnées pédestres, l’alpinisme, hébergement chez l’habitant et d’autres… Il permet aux visiteurs de découvrir des cultures tout à fait originales et d’explorer des produits purement bio.

Depuis l’éclosion du tourisme de masse en tant que catalyseur des grandes vacances d’été, et compte tenu des répercussions négatives que cette activité principale a eu sur plusieurs environnements, certaines niches -existant depuis tout temps – ont pu être valorisées, et de gré, notamment avec la prédominance  du concept de durabilité, plus que jamais, tendant à préserver les milieux et espaces fragiles, autant par rapport au potentiel naturel, et celui immatériel lié aux populations vivant dans ces espaces.

Le tourisme rural s’inscrit donc comme un paravent idoine pour ces derniers, contre les effets néfastes des formes de tourisme de masse.

Préserver la biodiversité (faune et flore) et les traits originaux de la culture locale prévalente dans ces espaces est l’essence même du tourisme rural, sa raison d’être, quêtant la préservation des trésors de la terre.

Compte tenu des inégalités environnementales et sociales auxquelles le Maroc est confronté, ainsi que pour remédier ce déséquilibre des acteurs économiques, les locaux, dans la plupart des cas, ont choisi d'investir dans le tourisme en milieu rural. Ainsi des établissements touristiques ruraux commencent à prendre de l’ampleur, visant à consolider la notion du tourisme durable avec ses produits artisanaux locaux, ses variétés culinaires régionales et ses folklores saisonniers aux traditions bien enracinées pour une meilleure attractivité. Mais ces actions peuvent-elles garantir un avenir radieux à ces établissements sans l’intervention de l'État ? Formation à la protection de l'environnement et des ressources naturelles, des formations en faveur des guides et accompagnateurs de voyages, sensibilisation des acteurs traditionnels et la mise en tourisme par le biais des investissements afin de vitaliser ce pan du tourisme durable.

Très vague fut elle, aux contours indéfinis notamment à l’ère du lancement de la Vision 2010, l’intérêt pour une promotion spécifique et ciblée du tourisme rural n’a pris son essor qu’en 2004 avec le lancement du concept des Pays d’Accueil Touristique (PAT) : Soit 9 marques, 9 identités distinctes représentées par les produits du terroir. Ce concept a réussi à séduire dans ses débuts mais a fini par voir son rayonnement s’estomper peu à peu, en attendant la version renouvelée parue avec l’avènement de la Vision 2020, et la stratégie de développement du tourisme rural, indexée sur le volet durabilité, détaillée en long et large sur la feuille de route, avec comme nouveauté la création de « corridors thématiques » mettant en exergue l’offre « Nature » du Maroc mais n'allant toutefois pas de pair avec les 08 territoires touristiques définis dans ladite feuille de route : Centre Atlantique, Maroc Méditerranée, Maroc Centre, Atlas et Vallées, Grand Sahara Atlantique, Cap Nord, Marrakech Atlantique et Souss Sahara Atlantique.

Le patrimoine culturel est aujourd'hui considéré comme un atout bien adapté pour ouvrir de nouvelles possibilités dans les zones rurales marginales qui ont besoin de secteurs d'activité supplémentaires, dont le tourisme est l'un des plus florissants. Les biens du patrimoine culturel sont souvent considérés comme des ressources vulnérables, mais en même temps, ils stimulent les émotions et peuvent représenter des expériences très recherchées par un créneau particulier de touristes.

 

Par la richesse de ses ressources, le tourisme en milieu rural semble répondre aux attentes émotionnelles et à la demande d’espace et de calme de ces clientèles. La variété des paysages, des cultures, des patrimoines, des savoir-faire offre la possibilité d’une grande gamme d’activités ludiques et excentriques. Le tourisme rural est un élément indispensable de la composition touristique nationale du Maroc, en particulier pour le développement social et économique en dehors des zones urbaines de plus en plus surpeuplées. La visite de destinations touristiques rurales stimule la croissance des économies locales, crée des emplois et soutient la diversification de l’économie du pays en grande partie basée sur l’agriculture.

Face à l’importance croissante du tourisme rural dans le pays, les parties prenantes du sud du Maroc se sont réunies en mai 2011 pour former la première association de tourisme rural du Maroc. Le Réseau de développement touristique rural (RDTR) a été développé pour renforcer les capacités institutionnelles, développer des circuits touristiques ruraux, soutenir le renforcement des capacités et la formation du personnel dans les zones rurales, créer un écolabel du tourisme rural et améliorer la promotion des produits du tourisme rural.

Les paradigmes de mise en valeur des territoires touristiques auront tendance à changer à l’ère Covid et post-Covid : Moins de rassemblements dans les sites d’intérêts touristiques par souci de préservation des mesures de distanciation entre visiteurs, notamment.

C’est ainsi que le tourisme de masse semble perdre du terrain, jour après jour, en faveur d’un tourisme soft, respectueux de l’environnement : Moins de pression sur les sites d’intérêt biologique et écologique (SIBE) , sur les villes situées en campagne, sur les zones rurales fragiles, synonyme d’épanouissement d’une nature qui respire enfin.

Le tourisme rural fait foi de tourisme de niche aussi, et c’est ce dernier qui représentera petit à petit le visage nouveau du Maroc, avec une mise en valeur différenciée des potentiels touristiques, à gré, très raisonnablement.

Les différentes stratégies inhérentes au tourisme rural, conçues dans l’esprit des Vision 2010 et 2020, et précédemment évoquées, sont tellement conventionnelles qu’elles ont fini par déchanter. Leur aura a vite fini par décroître et perdre de sa subsistance par effet d’inadéquation entre objectifs, réalités du terrain, et moyens affectés pour faire éclore une conception nouvelle dans l’esprit des investisseurs potentiels.

Des territoires abandonnés à leur sort, pourtant recélant des ressources naturelles inégalées est un fait que l’on doit admettre présentement et dans un futur proche.

Ces concepts « conventionnels » n’ont pas abouti, essentiellement pour des problèmes de gouvernance.

La solution ne réside pas dans le fait de changer de graphiques, de dénominations et de s’inspirer les yeux fermés de ce qui se fait ailleurs. La réussite viendrait tout d’abord de la maîtrise absolue des propriétés des territoires, de la mise en valeur juste et raisonnée des potentiels naturels et de la prise en compte de l’harmonie humaine dans un cycle vertueux, c’est ce à quoi doivent songer nos instances dans un futur proche.

Article co-écrit avec M. EL ARCHI Youssef 

Credit photo : le360.ma